Reforest’Action / Participation de Reforest’Action au One Forest Summit : sommet mondial en faveur de la préservation et la gestion durable des forêts tropicales
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Participation de Reforest’Action au One Forest Summit : sommet mondial en faveur de la préservation et la gestion durable des forêts tropicales

Stratégie et RSE

Un sommet en faveur de l’action climatique et de la préservation de la biodiversité

En tant que Président fondateur de Reforest’Action, Stéphane Hallaire a participé au One Forest Summit, les 1er et 2 mars 2023, à Libreville, au Gabon. Ce sommet a constitué un moment clé. En effet, il visait non pas à faire adopter de nouvelles déclarations politiques mais davantage à mettre en œuvre les engagements pris à Glasgow pendant la COP 26 - réduire et inverser la déforestation d’ici 2030, puis à Montréal lors de la COP 15[i] - protéger 30 % des terres et des mers. Ce sommet visait aussi à valoriser l’apport des forêts tropicales – en particulier celles africaines, qui sont relativement méconnues du grand public[ii]. Il constitue aussi un sommet international qui a placé au cœur des débats la question de la valorisation du capital naturel. Les grands massifs forestiers représentent en effet des « biens publics mondiaux » d’après l'Elysée, que les acteurs publics et privés se doivent de préserver.

Un sommet à l’origine du Plan de Libreville

Le One Forest Summit a rassemblé plus de 20 chefs d'État représentatifs des grands bassins forestiers, des membres de la communauté scientifique, des acteurs de la jeunesse africaine, des chefs d’entreprises et des représentants des populations autochtones. Il a aussi accueilli des dirigeants de l’UNESCO, de l’UICN, du Fonds pour l’environnement mondial et du Fonds vert pour le climat. Les échanges menés par ces parties prenantes ont abouti au Plan de Libreville[iii], c’est-à-dire à des engagements et des initiatives concrètes. En effet, les parties prenantes ont cherché à trouver un accord juste : en cherchant non seulement à concilier la protection de l’environnement et le soutien à l’économie (1°) mais aussi en considérant la forêt comme étant au service du développement (2°).

1° Concilier protection de l’environnement et soutien à l’économie

Plusieurs mesures ont été adoptées en ce sens :

1/ Le soutien en faveur des « partenariats de conservation positive » (PCP)[iv] :

Ce mécanisme des PCP représente un contrat politique et financier conclu entre la communauté internationale et les pays qui acceptent de garder intacte les réserves vitales de carbone et de biodiversité sur leur territoire. Au plan opérationnel, il constitue un plan d’investissement : une rémunération sera apportée à ces pays en échange de la protection des forêts. En effet, en contrepartie de l’engagement des pays forestiers, la communauté internationale mettra à disposition plus de financements, mais aussi un mécanisme de rémunération des services rendus par la nature gardée intacte, dont la séquestration du carbone ».

Pour initier les contrats de conservation positive dès demain et apporter des premiers résultats tangibles à la COP28 de Dubaï, la France, Conservation International et la Fondation Walton ont annoncé la création d’un premier investissement pour les contrats PCP de 100 millions d’euros[vi]. Sur la base des recommandations du Fonds pour l'environnement mondial, reste encore à préciser les contours de ce nouvel outil de financement innovant - y compris dans une logique combinée avec les crédits carbone (un arbre planté, un arbre sauvé) en vue de garantir la pleine intégrité environnementale d’un potentiel marché de certificats biodiversité**.** En effet, les pays qui veulent toucher cette aide recevront des « certificats biodiversité » accordés pour des « services rendus par la nature gardée intacte - achetés par des États ou des acteurs privés.

2/ L’accélération de la structuration d'un marché de crédits carbone à très haute qualité environnementale et sociale à l'échelle de projets ou de politiques et initiatives nationales[vii] :

Sur la base des recommandations formulées par un groupe d'experts coordonné par le Fonds pour l'environnement mondial, une coalition multi-acteurs comprenant des États, des investisseurs, des certificateurs et organisations non gouvernementales a lancé un plan de travail de Libreville pour accélérer la structuration d'un marché de crédits carbone à très haute qualité environnementale et sociale, à l'échelle de projets ou de politiques et initiatives nationales.

Ces crédits carbone pourraient financer des projets aux impacts positifs pour le climat : en maintenant le carbone dans le sol ou en faveur de la biodiversité tout en profitant aussi aux populations locales. Le mécanisme de certificats permettra de signaler à la fois à des États souverains, voire à des acteurs privés, qu’ils peuvent rémunérer ces pays pour les efforts qu'ils réalisent dès lors qu’il est possible de garantir qu’il s’agit bien d’un engagement solide qui perdurera dans le temps[viii].

2° Considérer la forêt comme étant au service du développement

Le plan de Libreville reconnaît, indirectement, la multifonctionnalité des forêts. Il valorise ainsi leurs rôles en matière de développement. En effet, il ambitionne de concilier développement économique et protection de l’environnement, notamment en reconnaissant les bénéfices environnementaux et économiques apportés aux populations locales. Les forêts tropicales rendent un service inestimable aux populations locales et à l'humanité en offrant de nombreuses ressources mais aussi en piégeant le carbone et en abritant des hotspots de biodiversité. Différentes mesures ont ainsi été adoptées dans le Plan de Libreville :

· Le développement d’outils favorisant la gestion durable des forêts : la protection forte comme les parcs nationaux, les modes de gestion durable des ressources naturelles, la protection des réserves vitales de carbone et de biodiversité comme les mangroves. Le lancement de l’initiative 10by30 devrait ainsi créer 10 millions d’emplois liés à la gestion durable des forêts d’ici 2030 - en favorisant l’agroforesterie couplée à des activités agro-industrielles, ou en adoptant les principes de l’économie circulaire dans les chaînes d’approvisionnement, ou en développant des plantations dédiées à l’utilisation du bois de chauffage pour freiner la déforestation.

· La promotion de chaînes de valeur durables dans le secteur forestier[ix].

· La reconnaissance du rôle des communautés autochtones et l’inscription de ces pratiques à la valeur inestimables pour le futur de l’humanité[x] d’ici 2024 à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO.

· La progression des connaissances et la promotion de la coopération scientifique concernant les écosystèmes forestiers, avec la création d’un projet One Forest Vision pour cartographier trois forêts tropicales ultra-importantes : la forêt amazonienne, celle du bassin du Congo et celle d’Asie du Sud-Est. L’objectif consiste à mesurer l’impact en matière de carbone et de biodiversité[xi].

Un sommet reconnaissant le rôle des acteurs publics et privés dans la préservation des forêts - ces « biens publics mondiaux »

Le président français Emmanuel Macron souhaite ériger le One Forest Summit en un évènement annuel afin de continuer à orienter l’action climatique mondiale des acteurs publics et privés en faveur de la préservation de ces principaux puits de carbone. Comme il l’a souligné, au plan mondial, les forêts représentent « un bien commun précieux » : elles constituent 50 à 75 % de la biodiversité terrestre et représentent le deuxième puits de carbone de la planète. Ce sommet mondial en faveur de la préservation et de la gestion durable des forêts tropicales a donc mis au cœur des débats la question de la valorisation du capital naturel par les acteurs publics comme privés et la multifonctionnalité des forêts.

Dans ce contexte, Reforest’Action se réjouit de constater que le financement de projets carbone de qualité constitue un pré-requis indispensable pour atteindre les objectifs de neutralité carbone planétaire – bien qu’ils ne constituent pas une finalité. En effet, un financement efficace doit aller bien au-delà de l’impact carbone. Nous considérons qu’il doit inclure la promotion et la préservation de la biodiversité et permettre de développer des bénéfices pour les populations locales – ce qu’encourage d’une façon constructive le Plan de Libreville. Le financement de projets carbone de qualité ne doit pas non plus être dévoyé en détournant l’attention des acteurs économiques des nécessaires baisses de leurs émissions de CO2.

Enfin, ce sommet a également été l’occasion pour Stéphane Hallaire d’échanger avec des membres des gouvernements français, rwandais et ceux du Costa Rica concernant les meilleures pratiques actuelles qui permettraient de mettre en œuvre rapidement et efficacement la protection et la restauration des écosystèmes forestiers. Le fait que ce sommet rassemble des acteurs privés et publics contribue en effet à aligner la volonté politique sur les enjeux économiques. La prochaine COP et les futurs rendez-vous de 2023 permettront d’avancer concrètement sur ces sujets d’envergure particulièrement complexes.


[i] Le Cadre mondial pour la biodiversité (CMB) a été adopté le 19 décembre 2022, lors de la conférence des Nations unies sur la biodiversité (COP15) à Montréal. Il se compose de quatre objectifs mondiaux primordiaux pour protéger la nature. Il vise à lutter contre la perte de biodiversité et à restaurer les écosystèmes.

[ii] En séquestrant des millions de tonnes de C0², les bassins forestiers jouent un rôle critique dans la régulation du climat. Par la faune et la flore exceptionnelles qu’ils recèlent, ils abritent des trésors de biodiversité et jouent également un rôle crucial pour prévenir l’apparition de nouvelles épidémies. Les forêts tropicales abritent 80% de la biodiversité terrestre du monde et absorbent le CO2 dans l’atmosphère grâce à la photosynthèse. Les forêts constituent le deuxième plus grand puits de carbone au monde après les océans : elles absorbent deux fois plus de C0² qu’elles n’en émettent.

Derrière l'Amazonie, le bassin du Congo est le deuxième massif forestier et constitue le poumon écologique de la planète, avec ses 220 millions d'hectares de forêts répartis à travers plusieurs pays, dont la République démocratique du Congo, le Congo-Brazzaville et le Gabon. Elle absorbe à elle seule 3 tonnes de CO2 chaque seconde. Il est recouvert à 88 % par la forêt équatoriale, l’un des deux principaux poumons verts de la planète. Or ce « poumon vert » est menacé par la surexploitation agricole et industrielle, avec notamment l'exploitation forestière, pétrolière et minière. Sur son territoire, il s'est notamment engagé à protéger un tiers des espaces naturels, terrestres comme marins : un objectif que la France porte à l'international avec la coalition de la Haute Ambition pour la Nature et les Peuples, lancée avec le Costa Rica et le Royaume-Uni, qui regroupe désormais une centaine de pays

[iii] Voir le "Plan de Libreville", feuille de route élaborée lors du sommet : https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2023/03/02/le-plan-de-libreville.

[iv] Les partenariats pour la conservation positive représentent une initiative lancée par la France à l’occasion de la COP27 de Charm el-Cheikh - le pendant des Partenariats pour la transition énergétique juste (Just Energy Transition Partnerships, JETP) qui associent acteurs et privés, déjà signés par l'Afrique du Sud, l'Indonésie et le Vietnam pour sortir du charbon.

[vi] La France fournira 50 millions d’euros de ce fonds. Le reste sera financé par la Fondation Walton et Conservation international.

[viii] Ces crédits pourraient rentrer dans le cadre de l'article 6.8 de l'Accord de Paris centré sur une approche non-marchande dont les modalités de mise en œuvre ont commencé à être débattues lors de la COP27 en novembre dernier. Le Gabon aurait ainsi identifié des projets basés non pas sur la compensation mais sur de la contribution - ne pouvant pas être soustrait des propres émissions des investisseurs - à forte valeur environnementale et pouvant être échangés au prix de 30 euros la tonne. Ceci représente alors une opportunité de limiter les prélèvements aux seules quantités laissant à la forêt la possibilité de jouer son rôle de gardienne de la biodiversité tout en confiant cette tâche aux populations locales qui seraient rémunérées à la fois par la vente du bois à des prix rémunérateur et l'entretien de ces espaces les forêts - un moyen de verser ce double dividende.

[ix] Le Gabon, la France et le Canada ont lancé une plateforme intergouvernementale sur l’utilisation durable du bois et des matériaux biosourcés dans la construction, afin de contribuer à remplacer le béton et le ciment dans les années à venir et de transformer notamment les stratégies d’urbanisation africaines. Neuf pays au total ont décidé de rejoindre cette coalition (Cambodge, Côte d’Ivoire, République du Congo, Ouganda, Royaume-Uni, Zambie, France, Gabon, Canada).

[x] Les populations autochtones représentent les premières sentinelles de la forêt : par leurs savoirs et leurs traditions ancestrales et par la relation unique dont elles sont les témoins entre l’Homme et la Nature. L’Ouganda, la France et le Gabon ont ainsi lancé une coalition « One Forest Guardian » visant à proposer aux pays volontaires d’inscrire d’ici 2024 à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO ces pratiques à la valeur inestimables pour le futur de l’humanité.

[xi] La communauté scientifique a lancé le projet « One Forest Vision » visant à cartographier dans les cinq prochaines années les réserves vitales de carbone et de biodiversité mondiales et mesurer le niveau de séquestration de carbone des forêts tropicales.

Crédit Photo : Elysée ; Luk Senning / Unsplash